"Quand on me demande de présenter le Domaine, j’ai tendance à laisser s’exprimer l’ours qui sommeille chez tous ces hommes qui passent beaucoup de temps seuls, dehors.
Je réponds alors souvent : « c’est moi… Augustin ».
En fait, c’est plus que moi.
C’est d’abord mon père, qui m’a donné l’amour de ce métier, ici, à Banyuls, ce vignoble à l’ancienne, pour ne pas dire carrément antique tant il est vieux. C’est aussi le domaine familial, dans lequel j’ai travaillé pendant mes vacances quand j’étais enfant, d’abord à la préparation des commandes, au frais à la cave puis, quand la force m’est venue, à la vigne, au soleil de midi, avec les ouvriers de mon père. Je me souviens encore de ma première journée de pioche à Col Perdiguet, dur moment.
Pourtant, c’est ce métier que j’ai choisi pour me lancer dans la vie.
Je suis resté 3 ans sur le domaine familial, 3 années passées avec ces ouvriers qui sont les premiers à m’avoir appris les gestes qui permettent de tailler, greffer, biner, labourer, attacher…C’est aussi pendant ces années où, pour la première fois, on m’a appris le travail à la cave : les pressurages, les remontages, les pigeages, l’ouillage, et tous les autres gestes qui amènent des raisins à donner du vin.
Après ces 3 ans, j’ai senti la nécessité de me donner du temps pour voir ailleurs avant de revenir. Je voulais savoir pourquoi je reviendrai.
C’est chez Jean Thévenet, à Quintaine, que pour la première fois je travaillais hors du cocon familial, hors du clan. Le déracinement fut doux, Jean m’a accueilli comme un fils, et nous conservons une amitié toute particulière.
La suite de mon compagnonnage se fit chez Frédéric Mugnier à Chambolle. J’y suis resté 2 ans durant lesquels je fis un BTS viti oeno à Beaune. Je ne lui ai jamais dit, mais quelques semaines après être arrivé, un soir de vendange, avant le repas, Frédéric nous a servi un musigny 2001 au milieu du bureau qui servait de salle à manger le temps des vendanges. Ce soir là, au milieu des vendangeurs attablés, l’ambiance était des meilleures. De celles que l’on ne trouve qu’à la suite des journées chargées où le sentiment de chacun est d’avoir donné le meilleur de lui-même. Ce vin, ce soir là, n’a pas été remarqué. Moi, je goutais et me promettais de porter une attention toute particulière au travail qui était fait ici. Car c’est bien un ensemble de petites choses, de petits efforts, répétés parfois depuis plusieurs générations, qui permettent de faire la différence.
Riche de ces expériences en terre bourguignonne, terre de prédilection où le terroir a la place du roi, j’amorçais un retour au pays en allant travailler dans les Corbières chez Pierre Borie, à Boutenac. J’y ai appris la ténacité de ceux qui ont quelque chose à prouver et la force d’un sourire.
Je suis donc revenu chez moi en février 2014, et j’ai voulu, à partir de cette petite histoire, en écrire la suite en créant le Domaine Augustin.
Vous l’aurez compris, le Domaine Augustin ce n’est donc pas que moi, mais toutes ces histoires. Et d’autres encore que je vous raconterai volontiers à l’occasion, autour d’une bouteille."